« streetartist mélomane d’utilité poétique »


Elle fait chanter le bitume

Mettons à profit cette période de confinement partiel où les sorties sont restreintes à notre environnement proche pour redécouvrir avec un œil neuf notre quartier. Elle « sévit » depuis près de 3 ans sur nos trottoirs sur lesquels elle peint de courts extraits de chansons présentés dans des pictos minimalistes, suscitant sourires et souvenirs. Chaussez vos tennis, c’est parti pour une chasse aux trésors mémoriels. En cavale plutôt qu’en cabane avec Noémie, des Trottoirs qui chantent.

asaé : Noémie, comment t’es-tu lancée dans le street art sur trottoir ?
Noémie : Il y a une quinzaine d’années, de façon très personnelle, j’ai réalisé des pochoirs sur le sol, un peu comme un parcours, une succession d’indices. Ça fait 2 ans ½ que je réalise des œuvres sur les trottoirs avec la thématique « paroles de chansons » dans le but de partager un peu de poésie urbaine. Le sol est une surface peu utilisée, mes messages sont donc bien visibles.

asaé : Ton terrain d’expression est le 20° et les villes périphériques à cet arrondissement, pourquoi ?
Noémie : J’ai habité la rue Pixéricourt pendant 5 ans et le 20° reste un quartier que je fréquente assidument. J’ai aussi laissé des dessins à Montreuil, les Lilas, Romainville, le long du canal de l’Ourcq. C’est une question d’ambiance, d’interaction avec les gens. J’aime les endroits populaires et métissés où naissent des initiatives.

asaé : Comment détermines-tu le texte et le motif ?
Noémie : Je réalise d’abord des brouillons sur des sous-bocks cartonnés. Je pars toujours du texte, il faut que ce soit une œuvre qui me parle, j’en note des extraits, puis je réfléchis à comment illustrer soit la chanson dans son ensemble, soit un bout de phrase. N’étant pas du tout dessinatrice, je cherche une manière enfantine de représenter l’idée de sorte que ça puisse parler au plus grand nombre.

asaé : Comment procèdes-tu ?
Noémie : Pinceaux et peintures acryliques. Je n’achète pas la peinture, je mise sur la récup, des dons de fonds de pots. Je peins la nuit tombée, je prends mon temps, je trace d’abord une ébauche à la craie pour l’échelle des lettres. Il ne faut pas que le support soit humide ni qu’il pleuve dans les heures qui suivent. Ni pochoir, ni bombe qui, pour moi, évoquent plus le monde du tag, du graff, l’idée de transgression. D’ailleurs, en dessinant sur les trottoirs, j’ai l’impression de moins dégrader l’espace public. 

asaé : Tes œuvres ne présentent aucune signature, aucun signe distinctif. Volontairement j’imagine ?
Noémie : Je ne pense pas que ce soit nécessaire car les gens ont compris l’idée, c’est devenu une forme de signature en soi. Je ne suis pas en quête de reconnaissance. Ma démarche est à la fois personnelle et altruiste. Je me fais vraiment plaisir quand je réalise une œuvre. 

asaé : Avant toi, on pouvait lire « Amour » sur les trottoirs de la capitale écrit par Jean-Luc Duez (décédé en avril 2017). Le fait de peindre sur le sol n’est donc pas nouveau mais le concept des extraits de chansons insérés dans des pictos l’est. Te sens-tu précurseur ? As-tu fait des émules ?
Noémie : Si quelqu’un reprenait l’idée, ce serait de toute façon différent. Il y a de soi dedans, dans le choix des textes, de la mise en scène, du type de dessin… L’idée me plait que les gens s’approprient mes messages, en préfèrent certains à d’autres, que ces fragments de poésie les interpellent dans leur environnement. J’aime le principe de transmission, de continuité, de faire découvrir des chansons aux jeunes générations, les inciter à les écouter et les partager avec leurs parents… 

asaé : Même la peinture acrylique finit par disparaitre. Comment vis-tu le côté éphémère ?
Noémie : Ça fait partie du jeu. Du genre : « ce message s’effacera au bout de X vues ». Je n’ai juste pas envie de retourner peindre dans des endroits où mes pictos ont été effacés volontairement.
asaé : Tu te souviens du tout premier ?
Noémie : « Because the sky is blue », un visage bleu avec une larme. Le second a été « wish you were here » puis « can you hear me major Tom» pour le troisième. 

asaé : Il y a-t-il des artistes vivant auxquels tu as emprunté des paroles qui ont réagi, qui t’ont fait des retours ?
Noémie : J’ai peint « le Youki » à l’angle de la rue où habite Richard Gotainer. J’espère que ça l’aura fait sourire. C’est un clin d’œil personnel. J’ai aussi peint « Moi aussi je veux du nougat » de Brigitte Fontaine. Œuvre qui a été relayée sur sa page officielle.

asaé : Des projets ?
Noémie : J’ai réalisé le sol du fumoir du bar La limite dans le 20° en juin 2017. Je suis intervenue à l’occasion d’un festival, pour peindre des messages en lien avec la programmation musicale, et pourquoi pas contribuer dans des lieux socio-culturels, des cours d’école…

Suivre Noémie : Page Facebook : Les-trottoirs-qui-chantent / Instagram : lestrottoirsquichantent



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