La Galerie du Crabe
Épater la
galerie
Poursuivons
notre escapade granvillaise avec un détour par la galerie du Crabe, l’une des
premières à s’être installée rue des Juifs, voie reliant la grande plage à la
Haute Ville, tenue par Yves Bouger, ex vice-Président du syndicat des
Antiquités d’occasion et des Galeries d’art modernes.
asaé : Yves,
quel est ton parcours ? Comment es-tu devenu galeriste à Granville ?
Yves : J’étais
étudiant en lettres à Rennes et j’ai rencontré une jolie femme qui m’a détourné
de la voie royale du vedettariat. Elle m’a amené à Granville. Je me suis posé à
La Rafale (NDLR bar emblématique de la Haute Ville), j’ai vu les dauphins et je
suis resté bloqué sur ce rocher depuis 20 ans ! Comme j’avais la volonté
de devenir écrivain en parallèle, je me suis mis à vendre des livres. J’ai été
bouquiniste sur les marchés et dans les salons. Puis, j’en ai eu assez de
regarder le ciel et de craindre la météo -les livres sont des objets
fragiles, j’ai donc ouvert en 2000 une boutique de livres anciens et BD rue des
Juifs dans une ancienne imprimerie. En parallèle, j’étais à tous les salons de
la Porte de Champerret -La Mecque du livre et du papier ancien. J’y vendais
aussi des illustrés modernes arts déco et de l’iconographie maritime. J’ai été
l’un des premiers à présenter des tableaux dans des salons du livre. D’ailleurs,
je me suis vite rendu compte que les tableaux étaient moins lourds à
transporter que les livres, d’autant que les prix des bouquins chutaient
terriblement. Je me suis donc tourné vers les toiles.
asaé :
Ton installation initiale rue des Juifs est donc fortuite mais depuis tu en es
devenu une figure emblématique…
Yves : L’idée
était que « l’esprit Haute Ville » démarre dès la rue des Juifs. Faire
de cette voie une sorte de Rue Gama attractive et sympa avec son boucher, son
bistro, sa galerie… Et, progressivement d’autres galeristes se sont installés
jusqu’à ce que Granville devienne la seconde ville de Normandie en terme de
nombre de galeries après Honfleur !
asaé :
Comment t’es-tu formé ?
Yves :
Tout seul. J’ai beaucoup lu sur la peinture et sur la vie des peintres. J’ai su
très vite ce que je n’aimais pas ! Pour vendre un tableau, il faut être en
mesure de circonstancier le peintre, la toile, être capable d’en parler, de
transmettre les émotions et intentions.
asaé :
Toi-même tu dessines, il me semble ?
asaé :
Comment choisis-tu les artistes que tu exposes ? Il y a-t-il un
dénominateur commun ?
Yves : Je
suis originaire de Bretagne, près de Pont Aven, une terre de peinture. Les
bretons ont une appétence, une envie de décorer leurs murs quelle que soit leur
catégorie socio-professionnelle. Le choix d’exposer untel ou untel est lié à
des rencontres. Lorsque je repère un peintre qui me plait, qui fait naitre une
belle émotion, qui raconte une histoire, je l’appelle. Je me suis rendu compte
qu’en tant que galeriste, j’avais un rôle de mécénat à jouer auprès des
peintres vivants, qui sont en demande de lieux d’exposition. C’est pourquoi
depuis quelque temps, la peinture contemporaine a pris le dessus.
asaé :
Comment te définis-tu ?
Yves :
Difficile… Collectionneur d’œuvres d’art… Amateur éclairé. Je suis tombé
dedans. C’est une passion irraisonnée. En tant que conservateur momentané, ce
que tu vois passer t’enrichit intellectuellement.
asaé :
Des projets ?
Yves : Une
nouvelle galerie place Cambernon (NDLR à la Haute Ville) agrémentée d’un petit
bistrot. Si la première galerie est assez éclectique, la seconde est dédiée à
la peinture contemporaine avec des accrochages monographiques ou thématiques ne
regroupant qu’un nombre limité d’artistes. Ledoeufre, Patrice Othon. J’espère
exposer le street artist Jérôme Mesnager (NDLR : qui possède un atelier à
Villedieu-les-Poêles, à proximité de Granville). Je vois cet espace comme un
lieu de convivialité, d’échanges autour de la peinture, une espèce de
laboratoire où seront organisés des happenings de théâtre, des accompagnements
culinaires autour des œuvres…
asaé : Des
combats ?
Yves :
Au nom du syndicat, notre ambition, et ce pour quoi nous nous battons, en tant
qu’acteurs culturels, est d’être rattachés au Ministère de la Culture alors
qu’à présent, nous sommes considérés comme des commerçants.
Galerie du Crabe, 68 rue des Juifs,
Granville
Retrouvez
Yves Bouger au salon international du livre rare, du 18 au 20 septembre, grande
nef, Grand Palais, 3 avenue du Général Eisenhower, 75008.
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